mercredi 23 avril 2008

Téter l'ogresse

A quel âge est-on adulte ?
Si 17 ans suffit, les extraits de contes ci dessous ont leur place sur ce blog.
Sinon, en attendant d'avoir de "vrais" adultes cela nous aidera peut-être à trouver d'autres pistes... Remarque : j'ai trouvé un conte où c'est une fille l'héroïne mais pour ce blog, elle est encore un peu jeune. Merci Michelle pour avoir entrouvert la porte !

Conte marocain (résumé)
C’était une pauvre veuve seule avec 7 enfants… Au début de chaque saison hivernale, l'ogresse Tériel faisait irruption chez la veuve et lui tissait sept couvertures de laine.Au bout de la septième année, alors que l'aîné des enfants avait atteint dix-sept ans, Tériel réapparut un soir d'hiver, comme de coutume. Elle annonça à la veuve : « Voilà sept ans que je t'aide à protéger ta progéniture des morsures du froid. Aujourd'hui je suis revenue te demander de m'offrir ton fils aîné afin de t'acquitter de ta dette »... La veuve saisit enfin la fausse générosité qui avait motivé l'ogresse durant toutes ces longues années…. La pauvre femme réfléchit un peu et pensa que, si elle refusait à l'ogresse ce qu'elle exigeait d'elle, celle-ci se fâcherait et serait capable d'avaler toute la famille. Elle se résolut alors à sacrifier son fils aîné, qui était pourtant son préféré. Elle alla le voir et lui dit à voix basse : « Mon fils, toi la première perle de mon collier de vie, tu dois accompagner l'ogresse chez elle ! Je pense qu'elle projette de te dévorer, mais il existe un moyen pour la contrarier et la faire tomber dans l'interdit, expliqua la mère. Dès qu'elle s'apprêtera à t'emmener avec elle, empresse-toi de lui téter le sein, tu deviendras ainsi son fils et même une ogresse ne peut dévorer son enfant » Il suivit les recommandations de la veuve. Surprise et dépassée par l'événement, l'ogresse se mit en colère et s'adressa à lui : « Petit misérable ! Tu m'as eue ! Mais je te prendrai malgré tout avec moi. » L'ogresse plongea le jeune homme dans son sac, le mis sur son dos … Et non, elle ne le mangea pas ! Il épousa même une princesse….

Conte d’Ali, résumé d’après Driss Chraïbi, conte du Maghreb
Il était un sultan qui avait épousé 7 femmes. Elles enfantèrent donnant naissance à des garçons. Elles les élevèrent jusqu’à ce qu’ils fussent grands. Le plus jeune d’entre eux s’appelait Ali. Cet Ali était très fort ; nul ne le surpassait dans tout le monde. Il aimait beaucoup la chasse et y allait chaque jour. Un jour le père dit à ses sept garçons : « celui qui égorgera sa mère est mon fils. Aucun autre n’est mon fils ». Ils allèrent trouver leur mère, et chacun égorgea la sienne. Quand à cet Ali, le plus petit d’entre eux, il se rendit chez sa mère en soupirant. Sa mère s’approcha et lui dit : « que t’arrive-t-il mon fils ? »
-Mère, c’est mon père qui nous a dit : égorgez vos mères ; alors les autres les ont égorgées. Il ne reste plus que moi qui ne t’ai pas égorgée.
- Mon fils, si tu veux, égorge-moi.
-O mère, je te jure devant Dieu de n e pas t’égorger.
- Que Dieu te bénisse, O mon fils.
La mère et le fils quittèrent le village pour s’installer ailleurs. Ali, tous les matins, part à la chasse. Un jour il voit une maison, entre et découvre que l’ogresse y habite. Elle l’accueille aimablement. Ali fait le geste de saisir le sabre pour se défendre, l’ogresse le rassure et lui propose de téter son sein ; Elle le nomme son fils. Une relation se crée entre eux, tous les jours Ali va chasser et lui apporte une partie de son butin. La mère ne sait rien de tout cela. Elle n’est plus intéressée par son fils, elle ne l’aime plus, elle désire seulement trouver un mari. Elle le trouve en la personne d’un ogre à qui elle demande de manger son fils. Ali exprime un dernier vœu, que ses os soient mis sur son cheval et que l’on dise au cheval d’aller là où il a l’habitude d’aller. La mère refuse mais l’ogre promet. Et il réalise la promesse. Les os sont ramenés à l’ogresse qui leur redonnera vie peu à peu.

samedi 19 avril 2008

Diderot , Lagrenée, Bachelier

Quand Diderot regardait les "Charités Romaines" des peintres de son temps...
Extrait de Littérature et pathologie, sous la direction de Max Milner. Presses Universitaires de Vincennes. 1989

Diderot est ici exemplaire : il a, pour son époque, une formation médicale approfondie (une de ses premières entreprises fut la traduction d'un dic­tionnaire de médecine), et elle se trahit dans nombre de ses œuvres....... Au Sujet de la Charité Romaine de Lagrenée :

"Le vieillard est beau, trop beau certainement, il est trop frais; plus en chair que s'il avait eu deux vaches a son service. Il n’a pas l'air d'avoir souffert un moment, et si cette femme n’y prend garde, il finira par lui faire un enfant..."

Au Salon de 1765, une autre Charité romaine, de Bachelier, aurait pu ré­pondre à l’idéal d' « humanité pathétique » souhaité par Diderot. Qu'en advient-il ?

"Vous avez voulu que votre vieillard fût maigre, sec et décharné, moribond, et vous l’avez rendu hideux à faire peur: la touche extrêmement dure de sa tête, ses os pro­éminents, ce front étroit, cette barbe hérissée lui ôtent la figure humaine, son cou, ses bras, ses jambes ont beau réclamer, on le prend pour un monstre, pour l’­hyène, pour tout ce qu’on veut, excepté un homme..."

mercredi 16 avril 2008

L'image de la Sainte Vierge, Gervais de Tilbury

Dans le Livre des Merveilles composé par Gervais de Tilbury au début du XIIIième siècle, voici ce que j'ai trouvé, même s'il n'y a pas d'allaitement direct...
" Ainsi en Basse-Syrie, dans la province de Damas, il y a, au pouvoir des païens, une église appelée Notre Dame de Sardenaï; il s'y trouve une icône représentant l'image de la très Sainte Vierge, avec un sein de chair fait par miracle divin qui donne, au lieu de lait, une huile bonne pour soigner les malades..."
Cette icône est mentionnée depuis 1175. Sa réputation miraculeuse en fit un grand lieu de pélerinnage des Croisés.

vendredi 11 avril 2008

La fille qui allaite son père, Grèce (Lesbos)

Ce conte nous a été indiqué par notre amie Isabelle et figure dans le recueil de Muriel Bloch "365 contes de la tête aux pieds" et dans "le Folklore de Lesbos " aux éditions Maisonneuve et Larose. Je le recopie intégralement (dans le recueil de Muriel Bloch).

"Un roi avait condamné à mourir de faim son ministre qui avait commis un crime.
La fille du ministre vint trouver le roi, les larmes aux yeux, et le pria de lui donner l'autorisation d'entrer une fois par jour dans la prison pour consoler son père, promettant de ne point lui porter de vivres.
La bonne fille, mère d'un enfant, avait sevré son enfant et gardait son lait pour nourrir son père chéri. C'est ainsi que le condamné vivait dans la prison, à l'étonnement des gardes et du roi. Enfin, la bonne fille se présenta au roi qui à ce moment, était à cheval. Le cheval n'était pas né; on l'avait tiré du ventre de sa mère qu'on avait tuée deux jours avant de mettre bas. La selle de ce cheval était faite de la peau de la mère.
Alors la fille dit au roi :
"Le roi est sur un animal qui n'est pas né, et sur la mère de celui-ci. Expliquez-moi cette énigme ou rendez-moi mon fils!"
C'était son père qu'elle allaitait, qu'elle appelait ainsi"

Pour une autre version grecque, mais du Péloponèse, cliquez ici !

dimanche 6 avril 2008

Gwerz de Santez Henori, 1863

Voici la traduction d'un Gwerz (complainte) recueilli par Luzel auprès d'Anne Salic, vieille mendiante, à Plouaret, en 1863.
Versions intégrales en Breton, en Français et musique sur une page internet perso :
SAINTE HENORI
Un gwerz, c'est long ! L'extrait ci dessous n'est que le premier épisode d'une longue histoire : Henori survivra et sera maltraitée par sa belle mère avant d'être vengée par son mari...

Ecoutez tous, et vous entendrez /Un gwerz nouvellement composé;/C'est à sainte Henori qu'il est fait./ Jamais son père ne l'a supportée,/Jamais il ne lui a désiré de bien ;/Il n'a fait que la chasser de son pays,/Et la priver de ses biens.
Mais hélas! il est tombé malade,/Et la maladie le malmène;/Et les prophètes lui disent/Que s'il tette un sein vierge, il sera guéri;/S'il tette un sein vierge, il sera guéri,/S'il appartient à une de ses filles.....
Le roi de Brest disait/Un matin :/- Je vais trouver ma fille aînée,/C'est celle-là que j'aimais la première/
- Bonjour à vous, ma fille aînée,/C'est vous que j'aimais la première./Je suis en proie à une maladie,/Et les prophètes me disent/Que si j'avais le lait d'un sein vierge, je serais guéri,/S'il appartenait à une de mes filles. -
- En cela, mon père, je ne puis vous secourir/En autre chose, je ne dis pas,/En toute autre chose je vous secourrai,/Sans nuire à mon corps ni à mes biens.
Je vais trouver ma fille cadette,/C'est celle-là que j'aimais le plus:/Bonjour, ma fille cadette,/C'est vous que j'aimais le plus./Je suis en proie à une maladie,/Et les prophètes ...
En cela, mon père, je ne puis vous secourir,...
- Je vais trouver ma fille Henori,/Jamais je ne lui ai désiré de bien;/Je n'ai fait que la chasser de son pays,/Et la priver de ses biens./Le roi de Brest disait,/En arrivant chez Henori/- Bonjour à vous, ma fille de Dieu. /- Et à vous aussi, mon père roi ! /- Je suis en proie à une maladie,/Et les prophètes me disent ...
- Que le Seigneur Dieu soit béni,/Puisque vous êtes obligé de recourir à moi, mon père!/Mettez-vous à genoux,/Je vais délacer ma poitrine./Aussitôt qu'elle eut délacé sa poitrine,/Son sein a été mordu par un serpent;/Et elle a poussé un cri./Henori est sur son lit,/Et personne ne la console;/Si ce n'est son père le roi, celui-là le fait./
Consolez-vous, Henori, ne pleurez pas,/Quand vous serez guérie, vous serez mariée;/Quand vous serez guérie, je vous marierai/Au plus beau fils de baron du pays.

Idylle, nouvelle de Maupassant, 1884

Voici des extraits de cette magnifique nouvelle que l'on peut trouver en ligne.

Le train venait de quitter Gênes, allant vers Marseille et suivant les longues ondulations de la côte rocheuse, glissant comme un serpent de fer entre la mer et la montagne, rampant sur les plages de sable jaune que les petites vagues bordaient d'un filet d'argent, et entrant brusquement dans la gueule noire des tunnels ainsi qu'une été en son trou.
Dans le dernier wagon du train, une grosse femme et un jeune homme demeuraient face à face, sans parler, et se regardant par moments. Elle avait peut-être vingt-cinq ans; et, assise près de la portière, elle contemplait le paysage. C'était une forte paysanne piémontaise, aux yeux noirs, à la poitrine volumineuse, aux joues charnues

Elle était mariée; elle avait déjà trois enfants laissés en garde à sa soeur, car elle avait trouvé une place de nourrice, une bonne place chez une dame française, à Marseille.
Lui, il cherchait du travail. On lui avait dit qu'il en trouverait aussi par là, car on bâtissait beaucoup
...

Le sein de droite apparut, énorme, tendu, avec sa fraise brune. Et la pauvre femme geignait : "Ah ! mon Dieu ! ah ! mon Dieu ! Qu'est-ce que je vais faire ?"
Le train s'était remis en marche et continuait sa route au milieu des fleurs

Le jeune homme, troublé, balbutia : "Mais... madame... Je pourrais vous... vous soulager."
Elle répondit d'une voix brisée : "Oui, si vous voulez. Vous me rendrez bien service. Je ne puis plus tenir, je ne puis plus."
Il se mit à genoux devant elle; et elle se pencha vers lui, portant vers sa bouche, dans un geste de nourrice, le bout foncé de son sein. Dans le mouvement qu'elle fit en le prenant de ses deux mains pour le tendre vers cet homme, une goutte de lait apparut au sommet. Il la but vivement, saisissant comme un fruit cette lourde mamelle entre ses lèvres. Et il se mit à téter d'une façon goulue et régulière.
Il avait passé ses deux bras autour de la taille de la femme, qu'il serrait pour l'approcher de lui; et il buvait à lentes gorgées avec un mouvement de cou, pareil à celui des enfants.
Soudain elle dit : "En voilà assez pour celui-là, prenez l'autre maintenant."
Et il prit l'autre avec docilité.
Elle avait posé ses deux mains sur le dos du jeune homme, et elle respirait maintenant avec force, avec bonheur, savourant les haleines des fleurs mêlées aux souffles d'air que le mouvement du train jetait dans les wagons.
Elle dit : "Ça sent bien bon par ici."
Il ne répondit pas, buvant toujours à cette source de chair, et fermant les yeux comme pour mieux goûter.
Mais elle l'écarta doucement :
En voilà assez. Je me sens mieux. Ça m'a remis dans le corps."
Il s'était relevé, essuyant sa bouche d'un revers de main.
Elle lui dit, en faisant rentrer dans sa robe les deux gourdes vivantes qui gonflaient sa poitrine:
"Vous m'avez rendu un fameux service. Je vous remercie bien, monsieur."
Et il répondit d'un ton reconnaissant :
"C'est moi qui vous remercie, madame, voilà deux jours que je n'avais rien mangé !"

samedi 5 avril 2008

Origine du riz, légende chinoise

Dans cette légende, certes les humains n'ont pas tété le sein de la déesse, mais ils en ont bien profité quand même...
"Jadis on ne connaissait pas le riz. On se nourrissait de fruits et de gibier. Les plants de riz étaient bien là mais les épis étaient vides.
Un jour, la déesse Guanyin vit combien l'humanité avait du mal à se nourrir. Débordant de compassion, elle se décida à les aider. Un soir, elle se glissa furtivement dans les rizières, et pressa son sein d'une main : le lait coula dans les épis de riz. Elle les pressa jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de lait. Tous les épis n'étaient pas encore pleins. Elle pressa ses seins avec encore plus de force : une mixture de sang et de lait en sortit. Dès lors les épis furent pleins, l'homme eu du riz à mâcher. Les grains blancs proviennent du lait, les grains rouges proviennent du sang de Guanyin."
Conte Han, traduit et annoté par Maurice Coyaud dans "Contes des Peuples de la Chine" (voir bibliographie).
Maurice Coyaud dit que la déesse Guanyin est le dieu compatissant hindou Avalokitesvara, devenu déesse en arrivant à pied par la Chine... Elle est souvent représentée avec onze visages et mille bras avec un oeil dans chaque paume...
Autres noms de la déesse androgyne : Kuan-yin, Kannon en sino-japonais.
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